écrire dans une langue étrangère, c’est se mettre sous hypnose.
Naît alors Cielo Arterial d’Iván Solano sur le poème María de Catherine Peillon (voir à la fin de l’article), œuvre architecturale pour 18 chanteurs solistes sollicités dans tout l’ambitus de leur tessiture.
Ecrit dans une langue « étrangère » à l’auteure, le poème chante notre condition d’exilés au monde.
Sa première phrase « Hemos perdido la noche » (nous avons perdu la nuit) donne le ton : recherche du sacré, inséparable de la peur (de la nuit) et du désir (retrouver le ciel et l’erre des étoiles).
Cielo Arterial
Ce titre s’est imposé à Iván Solano suite à l’écriture d’un court texte dont voici la version originale espagnole et sa traduction.
Las nubes se van alejando al son....
de ese cielo arterial
que enrojece el aire
que respira semillas de agua...
noches de trasnochar vivo...
como si el tiempo fuese miel...
y la musica luz...
energía, entraña...
Les nuages s’éloignent
au son de ce ciel artériel
qui rougit l’air
qui respire des grains d’eau...
nuits d’éveil vif...
comme si le temps était miel...
et la musique lumière...
énergie, entrailles...
Bonne découverte ou redécouverte musicale dans l’interprétation visuelle de Catherine Peillon !
Cielo Arterial / Iván Solano
Cielo Arterial / Iván Solano
Vient alors la création mondiale, objet de la commande de l’ensemble les éléments, de la pièce intitulée Cielo Arterial, écrite sur un texte espagnol de Catherine Peillon par le compositeur espagnol Ivàn Solano (né en 1973), présent au concert. Si le langage musical appartient indéniablement à notre temps, l’esprit n’opère aucune rupture absolue avec ce qui précède. Si les sons glissando marquent notre époque, l’auditeur découvre ici une surprenante inclusion lyrique et comme une citation musicale que ne renierait pas Tomas Luis de Victoria. Deux voix solistes se détachent de l’ensemble, celle de la soprano Julia Wischniewski, toujours aussi idéalement timbrée sur un incroyable ambitus, et le solide timbre de basse de Christophe Sam.

POUR ALLER PLUS LOIN…
La partition est consultable en version papier
dans les bureaux des éléments à Toulouse, 15 rue de la Pleau (métro Carmes).
Un panel de ressources complémentaires est à retrouver sur le Cen,
Centre de ressources pour l’art choral :


Iván Solano est clarinettiste, compositeur et chercheur. Il a étudié la clarinette puis la composition et la recherche à Madrid, Budapest, Paris, Strasbourg et Rome auprès de B. Kovacs, F. Rados, Gy. Kurtág, J.M. López López, A. Sedes, H. Vaggione, C. Groult et I. Fedele. Il réalise maintenant sa thèse de Doctorat sous la direction de Márta Grábocz à l’Université de Strasbourg. Il mène deux carrières parallèles, de compositeur et d’interprète. Pour lui, écriture et interprétation s’interpénètrent en un aller-retour incessant, jeu(x) entre moi et l’autre. Il collabore notamment avec G. Pesson, A. Posadas, H. Parra, H. Dufourt, J.M. López López, L. Guénin.
Son catalogue de musique «écrite» de plus de 40 pièces s’étoffe au fil des rencontres avec des ensembles et des interprètes de tous horizons, du Choeur de chambre Les Éléments au Quatuor Béla, en passant par l’Ensemble C-Barré, Musicatreize, Voix de Stras’, Anja Linder, Duo Dela, Emmanuel Olivier, Quatuor Girard, Kevin Seddiki et l’Orchestre Lyrique d’Avignon, entre autres. Le Prix SACEM de la partition pédagogique le récompense en 2010 pour son travail de transmission de connaissances aux enfants. Cette transmission, ainsi que l’abolition de la frontière compositeur/interprète/ auditeur, peuvent être considérées comme ses leitmotivs. Sa musique navigue entre les styles et les supports, depuis l’installation et la musique électroacoustique, jusqu’à la musique pour le théâtre en passant par la vidéo, l’espace sonore, le sound-design, la musique écrite pour toutes formations, mais aussi l’improvisation. Passionné de son, de musique, de science, de littérature, de photographie et d’autres cultures, il parle et écrit couramment plus d’une demi-douzaine de langues.
Hemos perdido la noche
en los albores de nuestro exilio
Hemos perdido el miedo y el silencio
Cae la tumba
nuestros cuerpos en el vacío
sin amanecer
Niñas de sangre y tierra
flores de sudor perfumadas sobre la piel viudas
de cenizas y lágrimas
habéis ligado nuestros sueños
Un puente colgante sobre el istmo
Ha impulsado encima el vacío
tan próximo
tan infranqueable
El cielo que se curva
bajo el peso de la noche
pájaros pesados
Al cielo el cielo
asciende el humo
cielo recto
trastorno
embriagado
partido como un pan
Un puente encima del cielo
abre la posibilidad de una aparición
El cielo que se curva bajo el pecho de la noche,
pájaros pesados
Al cielo el cielo
Nous avons perdu la nuit
À l’aube de notre exil
Nous avons perdu la peur
et le silence
Tombent chutent
nos corps dans le vide
absence de matin
Filles de terre et de sang
fleurs de sueur odorante
sur la peau
veuves de cendres et de pleurs
vous avez lié nos songes
Un pont au-dessus de l’isthme
lancé au-dessus du vide
si proche,
infranchissable
lointain
Au ciel qui s’évase
sous le poids de la nuit
de lourds oiseaux
Au ciel le ciel
La fumée qui gravit rectiligne le ciel
le trouble le grise
le rompt (comme un pain)
Un pont à travers le ciel
possibilité d’une apparitionAu ciel qui s’évase
sous le poids de la nuit
de lourds oiseaux
Au ciel le ciel
ta peau
bleutée
riant visage
Tu portes
cette toute petite chose
cette chose immense
Et toi
Sans autre lumière
Si belle dans toute cette violence
ce chaos
tu émerges
tu surgis
source de nos soifs
et nos désirs
les plus secrets
Le ciel qui t’avait envoyée
t’a reprise
dans ses rets de nuages
tu as disparu
sans ostentation
sans prendre garde
à ton ascension
Ce projet est porté par Les éléments – Centre d’Art Vocal d’Occitanie grâce au soutien du Ministère de la Culture – Direction régionale des affaires culturelles Occitanie, de la Région Occitanie / Pyrénées-Méditerranée, du Conseil Départemental de la Haute-Garonne, de la Ville de Toulouse, de la Maison de la Musique Contemporaine, de la SACEM et de la Fondation Bettencourt Schueller.
En collaboration avec le Cen, Centre de ressources dédié à l’art choral, ce projet a pour objectif de valoriser la ressource créée par l’ensemble et de la transmettre auprès d’un large public.
Merci à nos partenaires de diffusion qui permettent de relayer cette initiative auprès du plus grand nombre :
Futurs Composés, ARPA Mission Voix Occitanie, IFAC, Musique en territoires, Culture 31 et Ramdam.
